Témoignages

Tous se souviennent avoir eu vingt ans, la tête remplie de projets et tournés vers l’avenir. Pour ma part, une banale blessure au doigt m’a poussé à consulter un médecin à qui je demandais, par acquis de conscience, d’examiner la masse indolore qui s’était installée depuis peu au-dessus de ma clavicule. Par la suite, les rendez-vous médicaux se sont succédés jusqu’à la biopsie nécessaire au diagnostic final.

« Dans l’éventualité que ce soit un cancer, tu devras temporairement arrêter d’aller à l’école en raison de la fatigue qui accompagne la chimiothérapie », me dit celui qui, quelques jours plus tard, dirigeait mon opération. Le diagnostic définitif m’a été annoncé par un médecin non loin de la retraite, ne traitant pas lui-même des cancéreux, fixant le sol, évitant le terme cancer et vraisemblablement mal à l’aise, malgré son âge et son expérience, d’annoncer une telle maladie à un jeune homme.

Quelques jours plus tard, je me retrouvais tel un intrus dans la salle de traitement où la moyenne d’âge devait facilement être le triple du mien. Je me sentais épié par des gens qui vivaient, à leur façon, des moments tout aussi difficiles. Refusant d’abdiquer, j’ai tant bien que mal conservé mon sourire, mon entrain, mon rythme de vie en jonglant avec chimiothérapie, horaire de cours, sorties avec les amis et parfois activités sportives.

Huit mois se sont ainsi écoulés pendant lesquels je suis passé par une gamme d’émotions et ai entendu des témoignages tragiques que l’on méconnait généralement à mon âge. Finalement, les examens ont démontré une régression complète des tumeurs. Mon histoire, contrairement à d’autres, en est une d’espoir. Malgré l’épreuve, j’en suis ressorti grandi et mieux entouré; j’ai amorcé une relation amoureuse moins d’une semaine après mon diagnostic et mon oncologue traitant est aujourd’hui une figure influente de mon entourage.

J’ai certifié bien des choses, notamment la conviction de vouloir travailler à l’amélioration de la condition de vie des gens. J’ai maintenant 23 ans, j’étudie à la maîtrise et j’ai toujours autant de projets pour l’avenir. Par contre, au contraire de la plupart des jeunes de mon âge, j’ai conscience de la fragilité de la vie.